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Euronews: ExoMars entame sa quête de traces de vie sur Mars

29/03/2016 1130 views 11 likes
ESA / Space in Member States / France

Y a-t-il de la vie sur Mars ? Y en a-t-il eu dans le passé ? ExoMars tente de trouver des réponses à ces questions fondamentales pour l'Humanité. Nous nous sommes rendus au cosmodrome de Baïkonour au Kazakhstan pour assister au lancement du premier volet de cette mission menée par l'Agence spatiale européenne (ESA) en collaboration avec son homologue russe Roscosmos et rencontrer les scientifiques qui en sont à l'origine.*

L'aventure ExoMars  commence dans la steppe kazakh, sur le cosmodrome de Baïkonour là où il y a plus de cinquante ans, Youri Gagarine devenait le premier homme à s'envoler vers l'espace, ouvrant une page légendaire de l'histoire spatiale soviétique.  

A trois kilomètres du site de lancement, des scientifiques et ingénieurs européens et russes se rassemblent sur la plate-forme panoramique pour assister au décollage de la fusée russe qui transporte les éléments de la mission dont leurs précieux instruments. 

Le stress du lancement

"Notre instrument va être secoué, quelque peu tourmenté et il n'aime vraiment pas cela, s'inquiète Oleg Korablev, de l'Institut de recherche spatiale russe IKI. Mais on espère qu'il va s'en tirer," souligne-t-il. Nicolas Thomas, de l'Université de Berne dont l'équipe a construit la caméra CaSSIS, confie: "Depuis à peu près quarante minutes, mon cœur bat la chamade, je suis un peu nerveux. Je pense à tous ces gens qui ont mis tellement de travail dans cette mission, à toutes ces personnes qui sont ici et à toutes celles qui ne sont pas là qui ont fait d'énormes efforts pour que tout soit prêt sur ce pas de tir, indique-t-il avant d'ajouter à cinq minutes du lancement: Le stress est en train de monter." 

Dans un bruit assourdissant, la fusée russe s'arrache de son pas de tir. L'assistance est à la fois, soulagée et enthousiaste. Francesca Ferri, de l'Université de Padoue et responsable de l'expérimentation AMELIA, lance : "C'est fantastique, on est en route pour Mars ! C'est excitant !" 

Le décollage s'est déroulé en toute sécurité, mais il y a encore une part d'incertitude. Quelques heures plus tard au centre de contrôle de la mission à Moscou, les visages sont tendus au moment de la préparation d'une manœuvre complexe. 

Premières opérations réussies

La fusée doit allumer ses propulseurs quatre fois avant de se séparer de la sonde ExoMars proprement dite qui rejoindra la planète rouge. "Cet allumage est une explosion contrôlée qu'on réalise jusqu'à un certain point, il y a toujours un élément de risque sous-jacent," indique Nicolas Thomas. 

La procédure de séparation se déroule comme prévu. A présent, l'ESA doit vérifier que tout fonctionne. 

"On fait tous les tests qui concernent la sonde, on s'assure qu'elle est totalement sous contrôle, précise Thomas Passvogel, responsable des projets scientifiques de l'Agence européenne. Dans les semaines suivantes, on testera les instruments un par un, toutes les fonctions de la sonde, la grande antenne de communication avec la Terre, etc. Puis la sonde va dériver jusqu'à ce qu'on fasse la correction de trajectoire finale pour lui faire prendre la direction de Mars," conclut-il.

 Résoudre le mystère du méthane

En réalité, il ne s'agit que du premier des deux volets de la mission ExoMars. Une étape qui va permettre d'étudier l'atmosphère martienne, de détecter la présence de méthane et d'envoyer un atterrisseur sur sa surface. 

A travers l'Europe et la Russie, les spécialistes de Mars, notamment à Lyon, attendent avec impatience les premiers relevés. L'un des grands mystères qu'ils espèrent résoudre concerne le méthane. De petites quantités de ce gaz ont déjà été découvertes sur la planète rouge. "Le gaz auquel on s'intéresse le plus, c'est le méthane parce qu'il n'est pas stable dans l'atmosphère de Mars, explique Patrick Thollet, professeur assistant à l'Ecole normale supérieure de Lyon. Ce qui est stable dans l'atmosphère de Mars, c'est le dioxyde de carbone, poursuit-il. Si on y met du méthane, on sait qu'en quelques centaines d'années, il va se transformer en dioxyde de carbone ; donc s'il y en a, c'est qu'il est émis en ce moment même par la planète," dit le chercheur.

 Obtenir des images d'une résolution inégalée

 Les scientifiques chercheront à savoir où le méthane est émis sur Mars, puis ils compareront ces données avec les nouvelles images qu'ExoMars va produire. "Comme j'étudie la surface de Mars, le principal instrument qui va m'intéresser, c'est la caméra CaSSIS qui est construite à Berne, indique Cathy Quantin-Nataf, professeur à l'Université de Lyon. Cette caméra permettra d'avoir des images en couleur de Mars à une résolution qu'on n'a pas encore aujourd'hui et puis, surtout d'avoir la topographie de façon systématique et en haute résolution," assure-t-elle. 

Ces images permettront aussi d'alimenter un débat en cours sur la présence d'eau salée à certains moments et à certains endroits sur Mars. "On n'a pas vraiment découvert d'eau liquide sur Mars, on a découvert des traces de sel qui ont pu être déposées par de l'eau liquide, précise Patrick Thollet. Mais attention: on ne parle pas de sel de cuisine, met-il en garde, c'est plutôt un sel qui se rapproche du sel qu'on met dans l'eau pour faire de l'eau de javel; donc c'est quelque chose qui n'est pas forcément très favorable à la vie."

Réaliser des mesures de l'atmosphère et de la surface martiennes

 Quand la sonde ExoMars atteindra la planète rouge en octobre, les deux éléments qui la forment se sépareront: d'un côté, la sonde principale - l'orbiteur TGO - restera en orbite et le petit atterrisseur appelé Schiaparelli sera largué en direction de Mars. Il ira se poser sur une surface qui pourrait ressembler au sol de la steppe kazakh, mais en réalité, elle est très différente et beaucoup plus froide et sèche. Des caractéristiques que Schiaparelli explorera. "Grâce à cette capsule qui traversera l'atmosphère martienne, souligne Francesca Ferri, de l'Université de Padoue, on pourra faire des mesures localisées des conditions atmosphériques qu'on pourra intégrer à nos modèles pour comprendre le fonctionnement du climat de Mars." 

Les spectromètres de la sonde principale qui restera en orbite passeront eux aussi l'atmosphère martienne au crible. L'un de ces instruments a été développé par Oleg Korablev, de l'Institut IKI: "Notre instrument est dédié à la mesure de gaz à l'état de traces par le biais de l'observation du rayonnement solaire qui passe au travers de l'atmosphère de la planète rouge," détaille-t-il.

Trancher un débat fondamental

 A terme, l'analyse de ces différents relevés devrait nous permettre d'alimenter un débat fondamental: y a-t-il de la vie sur Mars ? Y en a-t-il eu dans le passé ? 

"On peut penser que c'est une planète qui est morte, reconnaît Patrick Thollet avant d'ajouter: En fait, il se passe des choses et surtout [c'est important de savoir si ce qui se passe] met en jeu de l'eau, le premier ingrédient de la vie." Pour Cathy Quantin-Nataf, Mars "paraît peu habitable, mais cela ne veut pas dire qu'elle ne soit pas habitée." 

Quant à Nicolas Thomas, de l'Université de Berne, il indique: "Si sur place, il y a du méthane en abondance - c'est ce qu'on voit localement -, cela ne veut pas dire qu'il y ait quelque chose de vivant. Je dois dire que je suis un peu sceptique, tempère-t-il avant de conclure: on s'agite autour de cette question de la vie; j'essaie pour ma part, d'inciter à garder la tête froide."

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