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Science & Exploration

N° 11–2013: Herschel n'observera plus l'Univers

29 April 2013

L'observatoire spatial de l'ESA Herschel a épuisé comme prévu sa réserve de liquide de refroidissement, l'hélium, ce qui met un terme à plus de trois années d'observations sans précédent de l'Univers froid.

Lancé le 14 mai 2009, Herschel contenait après son dernier remplissage plus de 2 300 litres d'hélium liquide, qui se sont évaporés lentement au fil de la mission.

Cette évaporation programmée d'hélium liquide était indispensable pour refroidir à un niveau proche du zéro absolu les instruments de l'observatoire, ce qui a permis à Herschel de procéder à des observations scientifiques de haute sensibilité de l'Univers froid jusqu'à aujourd'hui.

C'est cet après-midi que nous est parvenue la confirmation de l'épuisement de la réserve d'hélium, au début de la session quotidienne de transmission du satellite à sa station sol, située en Australie occidentale ; les températures mesurées sur tous les instruments d'Herschel sont en nette augmentation.

" Herschel a dépassé toutes nos attentes en nous fournissant une extraordinaire mine de données qui va occuper les astronomes pendant encore de nombreuses années ", déclare le Professeur Alvaro Giménez, Directeur Science et Exploration robotique de l'ESA.

Herschel a effectué plus de 35 000 observations scientifiques ; ses quelque six cents programmes d'observation ont emmagasiné plus de 25 000 heures de données, auxquelles s'ajoutent 2000 heures d'observations à des fins d'étalonnage. Cette riche moisson de données est engrangée au Centre européen d'Astronomie spatiale de l'ESA, près de Madrid en Espagne.

La mission Herschel nous laisse ces archives en héritage. Elles devraient nous permettre de faire davantage encore de découvertes que les astronomes n'en ont faites pendant la durée d'exploitation de la mission.

" La moisson de données scientifiques inédites recueillies par Herschel doit beaucoup à l'excellent travail accompli par l'industrie, les institutions et milieux universitaires européens dans le cadre de la conception, de la construction et de l'exploitation de l'observatoire et de ses instruments ", ajoute Thomas Passvogel, responsable des projets Herschel et Planck à l'ESA.

La mission Herschel s'est accompagnée d'un certain nombre d'avancées technologiques pouvant bénéficier à d'autres missions spatiales et déboucher sur des technologies dérivées. En effet, il a fallu pour la mission Herschel développer des systèmes cryotechniques de pointe, construire le plus grand miroir de télescope jamais envoyé dans l'espace et utiliser les détecteurs directs les plus sensibles qui soient de la lumière émise dans l'infrarouge lointain jusqu'aux ondes millimétriques. Les techniques de fabrication mises au point pour Herschel ont déjà été appliquées à la génération suivante de missions spatiales de l'ESA, et notamment à Gaia.

 " Herschel nous a offert une vision totalement nouvelle de l'Univers, en nous montrant des aspects qui nous étaient cachés jusqu'à présent, comme des processus encore jamais vus de naissance d'étoiles et de formation de galaxies, et en nous aidant à détecter la présence d'eau partout dans l'Univers, dans les nuages moléculaires comme dans les étoiles nouvelles, leurs disques protoplanétaires et leurs ceintures de comètes ", indique Göran Pilbratt, responsable scientifique du projet Herschel à l'ESA.

La naissance des étoiles

Les images époustouflantes prises par Herschel, montrant des réseaux complexes de filaments de poussière et de gaz dans notre galaxie, la Voie Lactée, dressent une histoire illustrée de la formation des étoiles. Ces observations exceptionnelles dans l'infrarouge lointain fournissent aux astronomes un éclairage nouveau sur la façon dont les turbulences agitent le gaz présent dans le milieu interstellaire et donnent naissance aux structures filamentaires présentes dans les nuages moléculaires froids.

Si les conditions nécessaires sont remplies, la gravité intervient et fragmente les filaments pour donner naissance à des noyaux compacts. Profondément enfouies dans ces noyaux se trouvent des protoétoiles, germes d'étoiles nouvelles qui, en réchauffant la poussière qui les entoure de quelques degrés seulement au-dessus du zéro absolu, se rendent visibles à l'œil thermosensible de Herschel.

Sur la piste de l'eau

Pendant les premiers millions d'années de la vie des étoiles, il est possible de suivre la formation de planètes dans les disques denses de gaz et de poussière qui tourbillonnent autour d'elles. Herschel a notamment pu déceler la présence d'eau, molécule cruciale pour la vie telle que nous la connaissons, dans des nuages contenant des étoiles en formation, dans des étoiles ou encore dans des disques contenant des planètes en formation.

Herschel a détecté dans ces disques de la vapeur d'eau dans des quantités représentant plusieurs milliers de fois les océans terrestres, ainsi que des quantités encore plus grandes de glace piégée à la surface de grains de poussière et à l'intérieur de comètes.

Plus près de nous, Herschel a également étudié la composition de la glace d'eau présente dans la comète Hartley-2 et a découvert qu'elle présente quasiment le même rapport isotopique que l'eau de nos océans.

Ces résultats relancent le débat sur la quantité d'eau terrestre provenant de l'impact de comètes sur notre planète. En associant ces données avec les observations de ceintures de comètes massives entourant d'autres étoiles, les astronomes espèrent réussir à comprendre si un processus similaire pourrait se produire dans d'autres systèmes planétaires que le nôtre.

Les galaxies au fin fond de l'Univers

Herschel a en outre contribué à améliorer nos connaissances sur la formation des étoiles sur de très grandes échelles dans l'espace et le temps cosmiques. En étudiant la formation d'étoiles dans des galaxies lointaines, il a montré que nombre de ces galaxies étaient le siège d'une très intense activité de production d'étoiles, même au tout début de l'histoire de l'Univers, il y a 13,8 milliards d'années.

Ces galaxies très actives produisent l'équivalent de centaines voire de milliers de masses solaires par an. À titre de comparaison, notre galaxie, la Voie Lactée, produit l'équivalent d'une seule masse solaire par an en moyenne.

Les chercheurs qui étudient la formation et l'évolution des galaxies ne savent pas comment ces dernières ont pu supporter un rythme de production d'étoiles aussi intense pendant les premiers milliards d'années de l'Univers. Les observations de Herschel semblent indiquer que lorsque l'Univers était jeune, les galaxies étaient beaucoup plus riches en gaz, ce qui permettait des taux élevés de production d'étoiles même en l'absence des collisions entre galaxies qui habituellement déclenchent les sursauts spectaculaires de formation d'étoiles.

" La fin des observations de Herschel ne signifie en aucune façon la fin de la mission : il nous reste de nombreuses découvertes à faire ", déclare Göran Pilbratt.

" Nous allons maintenant nous concentrer sur la mise à disposition de nos données en offrant les meilleurs cartes, spectres et catalogues possibles afin d'aider les astronomes actuels et futurs dans leurs travaux. Malgré tout, c'est avec tristesse que nous voyons cette phase d'observation s'achever. Un grand merci à Herschel ! "

Note aux rédactions

L'observatoire spatial de l'ESA Herschel a été lancé le 14 mai 2009 ; avec son miroir primaire de 3,5 m de diamètre, il constitue le télescope dans l'infrarouge le plus grand et le plus puissant jamais envoyé dans l'espace. Ses deux caméras/spectromètres imageurs, PACS (photomètre imageur et spectromètre) et SPIRE (récepteur imageur spectral et photométrique), couvrent à eux deux les longueurs d'ondes allant de 55 à 670 microns. Un troisième instrument scientifique, le spectromètre très haute résolution HIFI (instrument hétérodyne pour l'infrarouge lointain), couvre deux bandes de longueurs d'ondes : 157-212 microns et 240-625 microns. Ces trois instruments sont placés à l'intérieur d'un cryostat rempli d'hélium liquide superfluide qui les refroidit à -271ºC. La mission a fini par épuiser sa réserve de liquide de refroidissement le 29 avril 2013.

Bien que son hélium soit épuisé, Herschel va continuer à communiquer avec le sol pendant quelque temps et cette période sera mise à profit pour conduire une série d'essais techniques. Enfin, en mai, il sera propulsé sur une orbite de rebus stable autour du Soleil où il restera sur le long terme.

For further information:

Markus Bauer, Responsable Communication, Direction Science et Exploration robotique de l'ESA

Email: markus.bauer@esa.int

Tel: +31 71 565 6799, Téléphone portable : +31 61 594 3 954

Göran Pilbratt, Responsable scientifique du projet Herschel à l'ESA

Email: gpilbratt@rssd.esa.int

Tel: +31 71 565 3621