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OSIRIS-REx et Hera : mieux connaître les astéroïdes pour mieux défendre la Terre

20/10/2020 860 views 10 likes
ESA / Space in Member States / France

Les astéroïdes sont des corps célestes composés de roches et de métaux. Ils sont de taille variable, de quelques centimètres à plusieurs kilomètres de diamètre. Parmi eux, les astéroïdes géocroiseurs, ceux dont la trajectoire croise l’orbite de notre planète, sont potentiellement dangereux pour la vie sur Terre ; ils sont à ce jour le seul risque naturel que l’on peut prédire et contre lequel on pourrait faire quelque chose.

Et pour lutter contre le risque posé par les astéroïdes, il est impératif à la fois de les repérer suffisamment à l’avance, et de mieux les connaître – ces trois axes de travail sont intégrés au Programme de sécurité spatiale de l’ESA.

La France, l’Europe et l’ESA au service de la défense planétaire

Patrick Michel, co-investigateur de la mission OSIRIS-REx de la NASA et investigateur principal de la mission Hera de l'ESA
Patrick Michel, co-investigateur de la mission OSIRIS-REx de la NASA et investigateur principal de la mission Hera de l'ESA

Ce 20 octobre 2020 est un jour historique pour la mission OSIRIS-REx de la NASA, dont est partenaire le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) français. Après deux ans à proximité de l’astéroïde Bennu — pendant lesquels les scientifiques de la mission ont analysé les images qui montrent une grande diversité géologique des roches et du terrain — la sonde va descendre jusqu’à la surface de l’astéroïde, collecter des échantillons, et redécoller afin de ramener ceux-ci sur Terre.

« L’équipe des opérations a fait un travail formidable pour revoir entièrement la stratégie de descente à la surface et augmenter la précision à l’atterrissage de 50m à 10m, » explique Patrick Michel, co-investigateur de la mission OSIRIS-REx, directeur de recherche au CNRS et responsable du groupe de planétologie du laboratoire Lagrange à l’Observatoire de la Côte d’Azur. 

Les astéroïdes Bennu (525m de diamètre, cible de la mission OSIRIS-REx) et Ryugu (1km de diamètre, cible de la mission Hayabusa 2 de la JAXA) ont une même forme de toupie et une même densité mais un degré d’hydratation différent.
Les astéroïdes Bennu (525m de diamètre, cible de la mission OSIRIS-REx) et Ryugu (1km de diamètre, cible de la mission Hayabusa 2 de la JAXA) ont une même forme de toupie et une même densité mais un degré d’hydratation différent.

« Les exercices de descente effectués ces derniers mois ont permis de vérifier que la stratégie est bien implémentée et je suis donc totalement confiant que tout se passera bien jusque-là. Ma source d’inquiétude est la proximité d’un gros rocher, baptisé Mont Doom, et surtout ce qui va se passer lors du contact avec la surface du cylindre utilisé pour la récolte. Tant que l’on n’a pas touché une surface, on ne sait pas comment elle va réagir du point de vue mécanique, d’autant plus dans cet environnement de très faible gravité compte tenu de la petite taille de Bennu, » ajoute-t-il.

Les risques sont en effet nombreux : surface trop molle ou trop dure, pierre mal placée qui casse une articulation de la sonde, mécanisme de récolte qui ne fonctionne pas comme prévu… Mais quoi qu’il arrive, les scientifiques tireront de nombreux enseignements de cette tentative de récolte d’échantillons.

Hera, première mission de défense planétaire de l’ESA

Hera aux environs de Didymos, un système de deux astéroïdes géocroiseurs (vue d'artiste).
Hera aux environs de Didymos, un système de deux astéroïdes géocroiseurs (vue d'artiste).

Patrick Michel est également investigateur principal de la mission Hera de l’ESA ; il s’agit de la contribution européenne à AIDA, une collaboration internationale de défense planétaire entre des scientifiques européens et américains lors de laquelle sera effectuée pour la toute première fois une tentative de déviation d’un astéroïde.

Le véhicule spatial DART de la NASA, qui doit décoller en juillet 2021, effectuera un impact cinétique sur Dimorphos, une lune de 160m de diamètre en orbite autour de Didymos, un astéroïde de 780m de diamètre. Hera aura la délicate tâche d'effectuer une étude détaillée post-impact afin de transformer cette expérience à grande échelle en une technique de déflexion d’astéroïde maîtrisée et reproductible en prévision du jour où un astéroïde géocroiseur menacera la Terre.

Hera est en cours de développement par un consortium d'industriels européens suite à la signature du contrat de 129,4 millions d'euros attribué mi-septembre 2020.

Ouvrir l’œil sur le ciel

Un télescope Flyeye de l'ESA (vue d'artiste)
Un télescope Flyeye de l'ESA (vue d'artiste)

L’ESA développe actuellement un télescope automatisé afin d’opérer une surveillance nocturne du ciel, le premier d’un futur réseau qui identifiera automatiquement les nouveaux objets géocroiseurs potentiels, dont le suivi sera ensuite assuré par des chercheurs humains. Le premier de ces télescopes « Flyeye » de l’ESA, dont l’optique s’inspire de l’œil de la mouche, est en cours de construction près de Milan et sera installé en Sicile en 2021.

Le réseau de télescopes Flyeye sera à terme capable de détecter tout astéroïde de plus de 40m de diamètre au moins trois semaines avant un impact potentiel avec la Terre. Un groupe de travail des Nations Unies a déterminé que l’impact d’un astéroïde de plus de 140m de diamètre engendrerait une catastrophe à l’échelle d’un pays, voire d’un continent. On estime qu’il y a aujourd’hui entre 13 et 20 000 géocroiseurs de plus de 140m de diamètre, dont seulement 3000 sont identifiés et suivis.

D’ici là, le Centre de coordination du suivi des géocroiseurs de l’ESA en Italie continue de coordonner les observations d’astéroïdes effectuées par les astronomes du monde entier et d’évaluer les risques posés par les objets nouvellement découverts.