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Enquête sur les effets des vibrations dans les liquides

06/01/2010 581 views 1 likes
ESA / Space in Member States / Belgium - Français

La science vole haut à bord de l’International Space Station. L’expérience 'SODI-IVIDIL', de la taille d’une boîte de chaussures, qui se trouve dans le laboratoire européen Columbus a déjà produit pour les chercheurs des milliers d’images fascinantes sur un phénomène de tous les jours : l’influence des vibrations sur le mélange de solutions liquides.

Comme le cuisinier et le chimiste le sait par expérience, si vous voulez mélanger différentes liquides, vous devez les secouer. S’il est laissé à lui-même, ce phénomène est un procédé très lent. Ce mélange ‘naturel’, qu’on appelle diffusion, est fondamentalement un mouvement aléatoire de molécules qui migrent d’une zone à une autre. Les chercheurs s’efforcent de comprendre comment des vibrations influencent la diffusion. Pour ce faire, ils observent ce qui se passe dans l’environnement des mélanges qui sont exposés à des vibrations contrôlées en laboratoire ou lors de simulations avec de supercomputers.

L’inconvénient, ici sur Terre, est que la gravité est un facteur clef dans le processus de diffusion. Comme les molécules ont chacune leur propre poids, elles se comportent de façon différente dans la pesanteur terrestre. On a affaire, notamment, à une migration des zones de concentration élevée vers celles de faible concentration. Ce qui fait que les effets des vibrations se trouvent masqués.

Faire disparaître la force de poussée due à la gravité permet de comprendre le phénomène de manière plus intéressante et plus aisée.

Tout l’art de secouer

L’expérience IVIDIL (The Influence of Vibrations on Diffusion in Liquids) permet d’observer dans la station comment des solutions de liquides, sous l’influence de vibrations, peuvent se mélanger grâce à la diffusion et comment elles se dissocient suite à une diffusion provoquée par des différences de température. Cette recherche peut ne pas sembler très passionnante, mais c’est une enquête qui va dans la bonne direction au cœur de la physique de la matière et qui peut faire progresser les procédés chimiques de tous les jours.

 

Selon des théories qui ont été d’abord proposées par des chercheurs de l’Institute of Continuous Media Mechanics de Perm, en Russie, les vibrations peuvent créer un courant dans le liquide quand la température ou la concentration n’est pas partout la même. La convection par vibrations est très ténue et difficile à observer parce que le phénomène de poussée a tendance de prendre le dessus. L’impesanteur constitue le milieu parfait pour des expériences qui cherchent à comprendre les mélanges par vibrations.

Frank De Winne installing SODI
Frank De Winne installing SODI

Valentina Shevtsova, Professeur à l’Université Libre de Bruxelles et coordinatrice du projet, est enthousiaste au vu des premières observations. "Les résultats de l’expérience dépassent nos attentes. Les données que nous avons reçues permettent de voir pour la première fois de quelle manière des schémas de courant se produisent dans les liquides sous la seule influence de vibrations contrôlées." L’expérience a permis de suivre des changements de concentration qui sont de l’ordre de 0,03 % par rapport à la composition initiale. Obtenir d’aussi bons résultats n’est possible que dans les conditions d’un vol spatial de longue durée.

Scientists of the team lead by Valentina Shevtsova (right)
Scientists of the team lead by Valentina Shevtsova (right)

"De plus, nous pouvons démontrer les effets des vibrations et, surtout, évaluer leur impact sur la mesure des coefficients de thermodiffusion", poursuit Prof. Shevtsova. "Ce qui est une découverte primordiale et nous en sommes fiers."

Paradoxalement, IVIDIL pourrait aussi servir à percer la microgravité avec ses secrets. A bord des vaisseaux spatiaux, il y a toujours d’inévitables effets de micro-accélération qui agissent sur les expériences. A présent, les chercheurs peuvent se rendre compte de l’influence qu’ont ces ‘effets-g’ sur les mesures.

Des milliers d’images

SODI before installation in the hands of Robert Thirsk
SODI before installation in the hands of Robert Thirsk

IVIDIL emploie l’équipement SODI (Selectable Optical Diagnostics Instrument), qui a été élancé vers l’International Space Station (ISS) en août dernier. L’astronaute de l’ESA Frank De Winne et son collègue canadien Robert Thirsk l’ont assemblé, une fois arrivé dans la station. L’expérience IVIDIL est en cours depuis début octobre, en étant télé-contrôlée depuis le Spanish User Support Centre à Madrid.

Chaque jour, lorsque l’expérience a lieu, les équipes de chercheurs, en coordonnant de façon étroite avec le Centre espagnol, reçoivent et analysent déjà les images ainsi que la télémétrie. On est juste au début du dépouillement : des milliers d’images seront analysées avec le retour sur Terre du système où sont mémorisées les données. Cette mémoire va revenir à bord du Space Shuttle Discovery en février pour être remise aux scientifiques. "Son analyse va nous occuper pendant un bout de temps," note Prof. Shevtsova en esquissant un sourire.

SODI installed into Microgravity Science Glovebox
SODI installed into Microgravity Science Glovebox

SODI-IVIDIL a été proposée et conçue par le Microgravity Research Centre (MRC) de l’Université Libre de Bruxelles (ULB), l’Institute of Continuous Media Mechanics de Perm (Russie) et Ryerson University de Toronto (Canada) dans le cadre du programme ELIPS (European Life and Physical Sciences in Space) d’utilisation de l’ISS.

L’expérience a reçu le soutien du Direction ESA des Vols spatiaux habités et la collaboration de l’Agence Spatiale Canadienne. Elle met en œuvre l’équipement européen MSG (Microgravity Science Glovebox) dans le laboratoire Columbus.

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