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La « MELiSSA Pilot Plant »
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Survivre dans l’espace : après sa reconnaissance par l’université d’Anvers, le projet MELiSSA continue sur sa lancée

05/08/2017 2821 views 11 likes
ESA / Space in Member States / Belgium - Français

Comment assurer la survie des astronautes lors de futures missions spatiales de longue durée ? Pour des missions lointaines dans le système solaire, l’approvisionnement devient très compliqué. Avec le programme MELiSSA, l’ESA souhaite mettre au point un système de support de vie autonome. MELiSSA a fait il y a quelque temps l’objet d’une reconnaissance académique en Belgique à travers la remise d’un doctorat honoris causa par l’Université d’Anvers.

Christophe Lasseur fait partie du département de l’ESA Life Support & Physical Sciences Instrumentation où il dirige le programme MELiSSA. La Faculté des sciences de l’Université d’Anvers lui a décerné le 30 mars dernier un doctorat honoris causa, à un moment très chargé dans l’histoire de ce programme qui en est déjà à sa 27e année d’existence et qui est l’abréviation de Micro-Ecological Life Support System Alternative.

Christophe Lasseur : simultanément ingénieur et chercheur
Christophe Lasseur : simultanément ingénieur et chercheur

A l’heure actuelle, des astronautes réalisent régulièrement des missions spatiales de longue durée à bord de la station spatiale internationale ISS. Ces missions requièrent un approvisionnement régulier à l’aide de vaisseaux cargos automatisés. Ces opérations sont relativement simples à mettre en œuvre étant donné que l’ISS ne vole qu’à quelques centaines de kilomètres au-dessus de nos têtes.

Mais dans un futur pas si lointain, lorsque que les « éclaireurs de l’espace » iront plus loin dans notre système solaire – en direction des astéroïdes, de la planète Mars ou d’autres corps célestes – ce mode d’approvisionnement se révèlera vite impraticable et un système de support de vie (life support) autonome pour les astronautes sera indispensable.

Au travers du programme MELiSSA, auquel participent 11 pays, l’ESA étudie comment un tel système pourra à l’avenir fournir aux astronautes l’oxygène, l’eau et la nourriture dont ils ont un besoin vital.

Christophe Lasseur se définit lui-même autant comme ingénieur que comme chercheur. « MELiSSA est d’ailleurs aussi un mélange des deux » explique-t-il.

Préalablement à la remise du doctorat honoris causa, MELiSSA et la vie dans l’espace ont fait l’objet d’un symposium auquel l’astronaute belge Frank De Winne – actuellement à la tête du centre européen de formation des astronautes (EAC) – a notamment contribué. De Winne a accumulé une expérience très riche en matière de vols habités de longue durée. Il a en effet séjourné deux fois à bord de l’ISS : en 2002 pour un vol court de huit jours, et à nouveau en 2009, cette fois pour une mission de six mois. Lors de cette dernière mission, il eut l’honneur d’être le premier commandant de l’ISS non issu des Etats-Unis ou de la Russie.

« MELiSSA est parfois comparée avec la célèbre expérience Biosphere 2 du début des années 90, mais nous procédons de façon très différente », ajoute Christophe Lasseur.

« Ils se sont complètement coupés du monde afin de voir comment une biosphère autonome se stabiliserait. Nous suivons au contraire une approche déterministe, qui nous voit dans une première étape caractériser de façon la plus détaillée possible tous les processus, afin de les reproduire dans un deuxième temps. Nous nous basons pour ce faire sur le savoir accumulé depuis lors ».

MELiSSA est un programme à plusieurs facettes qui comprend de nombreux projets auxquels participent des universités et des industriels de toute l’Europe et même du Canada. Un moment important pour le programme eut lieu en 2009 lors de l’envol vers l’espace d’une première expérience. Un nouveau jalon fut posé en 2009 avec l’inauguration de la MELiSSA Pilot Plant à l’Universitat Autònoma de Barcelona (UAB) en Espagne.

« Cette Pilot Plant (installation pilote) comprend un circuit réalisé à partir de plusieurs composants et qui est absolument étanche à l’air, comme l’ISS », explique Lasseur. « L’année dernière, nous avons activé un photobioréacteur avec une culture d’algues grâce auquel nous avons pu maintenir en vie un « équipage » de trois rats à chaque fois pendant près de six mois. Les algues produisent de l’oxygène et retiennent le dioxyde de carbone, les rats font quant à eux exactement l’inverse ».

MELiSSA : déjà 27 années de recherche
MELiSSA : déjà 27 années de recherche

« Nous n’effectuons d’ailleurs aucune expérimentation sur les animaux. Les rats doivent simplement respirer et ils mènent une vie très confortable avant que nous ne les rendions aux services vétérinaires de l’université. Les algues reçoivent de la lumière, de la chaleur et des nutriments, de sorte qu’elles puissent retenir la quantité attendue de dioxyde carbone et produire l’oxygène nécessaire pour les rats, tel que cela a été calculé par nos modèles mathématiques ».

« Pour pouvoir valider la solidité de notre modèle, nous le testons avec des valeurs souhaitées différentes et nous passons au cours du temps d’une configuration à l’autre »

« Dans la Pilot Plant, de nouveaux éléments développés par les partenaires de MELiSSA sont constamment intégrés afin de les caractériser systématiquement et à long terme, et de les tester ».

Un doctorat honoris causa pour MELiSSA
Un doctorat honoris causa pour MELiSSA

Une entreprise de 50 ans

 

MELiSSA tente de recréer une version rationalisée d’un écosystème aquatique terrestre, mais cette ambition place les ingénieurs devant des défis énormes. Des modèles détaillés des processus de base sont nécessaires et tant la contamination que la dégradation doivent être évitées.

La prochaine expérience MELiSSA s’envolera pour l’ISS en septembre. ArtemISS, ou Arthrospira gene Expression and mathematical modelling on cultures grown in the International Space Station doit étudier à l’aide d’un photobioréacteur comment la situation d’apesanteur et de rayonnement influence la croissance des algues. Un peu plus tard, ce seront des rats qui devront survivre à l’aide d’un photobioréacteur.

Plusieurs années seront probablement encore nécessaires avant qu’un véritable système de support de vie régénératif soit assez fiable pour que des êtres humains puissent lui confier leur vie. Les participants à MELiSSA voient ce programme comme une entreprise de 50 ans. MELiSSA a d’ores et déjà permis d’obtenir de nombreux résultats avec des centaines de publications scientifiques et des brevets pour des spin-off dans des domaines tels que la préparation d’aliments, la filtration de l’eau et la sécurité microbienne.

Christophe Lasseur souligne la diversité d’un programme tel que MELiSSA, qui à l’instar de l’écosystème qu’il étudie, a développé une grande résilience au travers du temps. « L’ESA coordonne le programme, mais il y a de nombreuses contributions provenant des différents partenaires et organisations ».

« Nous réalisons de grands progrès dans des domaines tels que la gestion de l’eau, l’économie circulaire, l’agriculture urbaine et la gestion de l’environnement. Nous voyons qu’il existe en Europe une énorme motivation, et c’est cela qui nous fait avancer ». 

Contribution belge

Notre pays participe activement à MELiSSA par le biais de contributions notamment du Vlaamse Instelling voor Technologisch Onderzoek (VITO) et du Centre d’Etude pour l’Energie Nucléaire (CEN), tous deux installés à Mol.

Cliquez ici pour découvrir quels sont les partenaires belges impliqués dans MELiSSA. 

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