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Science & Exploration

N° 22–2002: XMM-Newton confirme l'hypothèse selon laquelle les supernovae seraient à l'origine de sursauts gamma

4 April 2002

Les sursauts gamma sont les explosions les plus puissantes qui aient jamais été détectées dans l'Univers. Elles constituent l'un des plus grands mystères de l'astronomie moderne, dans la mesure où leur origine n'avait jusqu'ici jamais été clairement établie. Deux grandes hypothèses avaient été avancées par les astronomes pour expliquer leur apparition : La collision d'étoiles à neutrons - des étoiles mortes, extrêmement denses - ou l'explosion d'étoiles très massives, les supernovae. Les récents résultats obtenus grâce à XMM-Newton, le télescope de l'ESA dans le rayonnement X, écartent la première de ces hypothèses et confirment la seconde, au moins en ce qui concerne le sursaut gamma qui s'est produit le 11 décembre 2001.

 

C'est en analysant l'émission rémanente du sursaut gamma dans le rayonnement X que les chercheurs ont pu détecter pour la première fois la présence d'éléments chimiques provenant sans conteste de l'explosion d'une supernova, survenue quelques jours avant le déclenchement du phénomène. "Nous pouvons désormais affirmer en toute confiance que la destruction d'une étoile massive, une supernova, a provoqué un sursaut gamma" a déclaré l'astronome de l'ESA Norbert Schartel, co-auteur de l'article publié jeudi à ce sujet par la revue "Nature". "Cependant, a-t-il ajouté, nous ne savons toujours pas exactement ni comment ni pourquoi se déclenchent ces sursauts qui constituent le phénomène le plus violent découvert dans l'Univers". Les premiers sursauts gamma ont été décelés par hasard en 1967, grâce à des satellites conçus pour surveiller l'application du Traité d'interdiction des essais nucléaires. Ceux-ci ont détecté une forte émission de rayons gamma provenant non pas du voisinage de la Terre mais de l'espace lointain. Le mystère a longtemps subsisté. Les sursauts gamma peuvent se produire jusqu'à plusieurs fois dans la même journée, mais il ne durent que quelques minutes et il n'existe aucune façon de prévoir où et quand il apparaîtront. Ils sont donc très difficiles à étudier.

Pendant trois décennies, les astronomes n'ont pas été en mesure de déterminer si l'origine de ces explosions était proche, issue de notre propre Voie Lactée, ou lointaine, provenant de galaxies éloignées. Ils sont cependant parvenus à mettre en place un système d'alerte qui leur permet aujourd'hui de pointer rapidement leurs télescopes vers un point précis du ciel dès qu'un détecteur donne l'alarme et d'observer ainsi, avant qu'elle ne s'évanouisse, l'"émission rémanente" d'un sursaut gamma. On sait désormais que ce phénomène se produit dans des galaxies distantes de plusieurs millions d'années lumière de notre Terre.

Le plus long sursaut jamais observé

Scientifiquement baptisé "GRB 011211" le sursaut gamma observé par XMM-Newton a été détecté pour la première fois le 11 décembre 2001 à 19 heures 09 minutes et 21 secondes (Temps Universel) par le satellite italo-néerlandais BeppoSAX. Le sursaut a duré 270 secondes. C'est le plus long jamais observé par un satellite. Les premières analyses ont permis de confirmer, après plusieurs heures, qu'un sursaut avait bien été détecté et l'équipe BeppoSAX a alerté la communauté astronomique. XMM-Newton a été pointé vers le lieu de l'événement onze heures après que celui-ci se fut produit. Cinq heures plus tard et c'eût été trop tard. Mais la chance a souri aux astronomes qui ont pu observer l'émission rémanente alors que celle-ci était encore 7 millions de fois plus brillante (dans le rayonnement X) qu'une galaxie toute entière. C'était la troisième fois que l'équipe XMM-Newton tentait de capter une telle émission et les résultats des deux précédentes tentatives n'avaient pas été probants.

Les observations effectuées ce jour là ont permis de faire deux constatations : D'une part que de la matière projetée par la source se dirigeait très rapidement vers la Terre (à un dixième de la vitesse de la lumière) et d'autre part qu'elle provenait - selon les analyses chimiques effectuées - de l'explosion d'une supernova.

"Nous nous sommes trouvés en présence d'une sorte de coquille sphérique de matière éjectée par une supernova très récente, portée à haute température par le sursaut gamma" a expliqué Norbert Schartel. "Le fait que cette matière se dirigeait vers la Terre signifie que la sphère était en expansion" a-t-il ajouté.

Silicium, soufre, argon et calcium

Les observations d'XMM-Newton ont permis de détecter de grandes quantités de magnésium, de silicium, de soufre, d'argon et de calcium, mais très peu de fer. Il s'agit là des matériaux composant une étoile massive ayant atteint le dernier stade de son évolution, juste avant l'explosion qui la transforme en supernova. Les réactions nucléaires se produisant dans son noyau entraînent la fusion d'éléments légers en éléments plus lourds, ce qui produit l'énergie qui fait briller l'étoile. Différents éléments sont synthétisés à chaque stade d'évolution de l'étoile. L'explosion d'une supernova aurait ainsi éjecté cette matière dans l'espace, produisant la sphère aperçue par XMM-Newton grâce à l'illumination produite par l'émission rémanente du sursaut gamma.

Les astronomes ont été en mesure de calculer les dimensions de la sphère : Dix milliards de kilomètres de rayon. Disposant de ces données, et connaissant la vitesse de la matière éjectée, ils ont pu déterminer que l'explosion de la supernova s'était produite quelques jours avant le phénomène.

La faible présence de fer dans la matière détectée corrobore cette séquence. Cet élément n'apparaît en effet dans la matière éjectée par une supernova que deux mois environ après l'explosion elle-même.

Les données recueillies ont également permis d'écarter l'hypothèse d'une collision d'étoiles à neutrons.

"Un tel événement n'aurait pas entraîné l'expulsion dans le milieu environnant des quantités de matière (magnésium, etc.) observées" explique l'astronome de l'ESA.

En outre, cette hypothèse ne peut expliquer la quantité relativement faible de fer décelée dans la matière expulsée. Un étoile à neutrons naît bien, en effet, de l'explosion d'une supernova, mais ce passage d'un état à un autre prend de nombreuses années, et non quelques jours.

Selon Fred Jansen, l'un des responsables scientifiques du projet XMM-Newton, "ces observations ont été rendues possibles par la surface collectrice sans équivalent et la très grande sensibilité du télescope européen". "L'atmosphère terrestre empêche les instruments au sol de détecter les rayons X en provenance de l'espace et aucun autre télescope spatial en activité n'aurait pu analyser avec une telle précision cette émission rémanente d'un sursaut gamma. Il s'agit là, à tout le moins, d'une étape importante dans la compréhension de ce type de phénomène", a-t-il ajouté.

Le mystère des sursauts gamma est cependant loin d'être totalement élucidé. Pourquoi toutes les explosions de supernova ne sont-elles pas suivies d'un sursaut ? Quel est au juste le mécanisme physique qui déclenche ces phénomènes ?

L'ESA s'apprête à lancer en octobre prochain une nouvelle mission spatiale qui pourra répondre très précisément à ces questions. L'Observatoire international du rayonnement gamma INTEGRAL sera en effet le plus puissant instrument d'étude du rayonnement gamma jamais lancé dans l'espace, capable de détecter les phénomènes violents provenant des régions les plus reculées de l'Univers.

Note au rédactions

XMM-Newton, le laboratoire à "miroirs multiples pour l'étude des sources du rayonnement X" lancé par l'ESA, est le plus puissant télescope spatial dans le rayonnement X qui ait jamais été mis en orbite. Il a été lancé le 10 décembre 1999 de Kourou (Guyane) par une fusée Ariane-5. Sa sensibilité sans précédent permet aux astronomes de se pencher sur nombre des énigmes de l'Univers, comme celle posée par l'apparition violente des trous noirs ou celle que constitue la formation des galaxies. XMM-Newton peut également observer des objets célestes situés dans notre propre système solaire, comme les planètes ou les comètes.

Les résultats des recherches entreprises sur les sursauts gamma grâce à XMM-Newton sont consignés dans un article publié dans l'édition du 4 avril 2002 de la revue "Nature" : "Evidence for outflowing supernova ejects in the afterglow of Gamma Ray Burst GRB 011211" signé par J.N. Reeves, D. Watson, J.P. Osborne, K.A. Pounds, P.T. O'Brien, A.D.T. Short, M.J.L. Turner, M.G. Watson, K.O. Mason, M. Ehle et N. Schartel.

D'autres précisions sur le programme scientifique de l'ESA et sur XMM-Newton et INTEGRAL sont disponibles sur le site suivant : http://sci.esa.int

Des informations sur l'ESA sont disponibles sur le site : http://www.esa.int

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