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Solar Orbiter’s first view of the Sun
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Les premières images de Solar Orbiter dévoilent des « feux de camp » sur le Soleil

16/07/2020 7685 views 5 likes
ESA / Space in Member States / France

Les premières images de Solar Orbiter, une nouvelle mission d’observation du Soleil de l’ESA et de la NASA, ont révélé d’omniprésentes éruptions solaires miniatures, surnommées « feux de camp » (« campfires » en anglais), proches de la surface de notre étoile.

D’après les scientifiques aux commandes de la mission, le fait d’avoir vu des phénomènes qui n’étaient pas observables en détail auparavant est un bon indicateur de l’énorme potentiel de Solar Orbiter, qui vient seulement de terminer sa « recette en vol », la phase initiale de vérifications techniques.    

« Ce ne sont que les premières images et nous pouvons déjà voir de nouveaux phénomènes intéressants, » déclare Daniel Müller, scientifique sur le projet Solar Orbiter à l’ESA. « Nous ne nous attendions pas à ces excellents résultats dès le départ. Nous pouvons aussi apprécier la manière dont nos dix instruments scientifiques se complètent mutuellement pour fournir une image holistique du Soleil et de son environnement. »

Lancé le 10 février 2020, Solar Orbiter embarque six instruments de télédétection, ou télescopes, qui observent le Soleil et son environnement, et quatre instruments in situ qui surveillent l’environnement autour de la sonde. En comparant les données recueillies par ces deux ensembles d’instruments, les scientifiques obtiendront un aperçu de la manière dont est généré le vent solaire, ce flux de particules chargées émis par le Soleil qui influe sur l’ensemble du Système solaire.

La mission Solar Orbiter a un aspect unique : aucun autre véhicule spatial n’a été capable de prendre des images de la surface du Soleil en s’en trouvant aussi proche.

Les images rapprochées du Soleil révèlent un nouveau phénomène

Les premières images du Soleil obtenues par l'instrument EUI de Solar Orbiter le 30 mai 2020; celles-ci révèlent d’omniprésentes éruptions solaires miniatures, surnommées « feux de camp ».
Les premières images du Soleil obtenues par l'instrument EUI de Solar Orbiter le 30 mai 2020; celles-ci révèlent d’omniprésentes éruptions solaires miniatures, surnommées « feux de camp ».

Les feux de camp mis en évidence dans le premier lot d’images ont été observés par l’imageur dans l’ultraviolet extrême (Extreme Ultraviolet Imager – EUI) lors du premier périhélie de Solar Orbiter, le point le plus près du Soleil situé sur l’orbite elliptique de la sonde. La sonde était alors à 77 millions de kilomètres du Soleil, soit environ la moitié de la distance entre le Soleil et la Terre.

« Les feux de camp sont petits en comparaison avec les éruptions solaires géantes que nous pouvons observer depuis la Terre, des millions ou des milliards de fois plus petits, » explique David Berghmans de l’Observatoire royal de Belgique (ROB), investigateur principal de l’instrument EUI qui prend des images haute-résolution des couches basses de l’atmosphère du Soleil, également connue sous le nom de couronne solaire. « Le Soleil semble peut-être calme à première vue, mais quand nous regardons en détail nous pouvons voir ces éruptions miniatures partout où nous regardons. »

Les scientifiques ne savent pas encore si ces feux de camp sont juste une version miniature des grosses éruptions ou s’ils sont le résultat de mécanismes différents. Il y a néanmoins déjà des théories stipulant que ces éruptions miniatures pourraient contribuer à l’un des phénomènes les plus mystérieux à propos du Soleil, le chauffage de la couronne solaire.

Dévoiler les mystères du Soleil

L'un des feux de camp nouvellement identifiés dans une image de l'instrument EUI de Solar Orbiter. Le cercle en bas à gauche indique la taille de la Terre à l'échelle.
L'un des feux de camp nouvellement identifiés dans une image de l'instrument EUI de Solar Orbiter. Le cercle en bas à gauche indique la taille de la Terre à l'échelle.

« Ces feux de camp sont totalement insignifiants en eux-mêmes, mais en additionnant leur effet sur l’ensemble du Soleil, ils sont peut-être la principale contribution au chauffage de la couronne solaire, » déclare Frédéric Auchère, de l’Institut d'astrophysique spatiale (IAS), France, co-investigateur principal de EUI.

La couronne solaire est la couche la plus externe de l’atmosphère du Soleil, qui s’étend sur des millions de kilomètres dans l’espace. Sa température est de plus d’un million de degrés Celsius, de plusieurs ordres de grandeur plus chaude que la surface du Soleil, qui n’est « que » de 5500°C. Après plusieurs décennies d’observations, les mécanismes physiques qui chauffent la couronne solaire ne sont toujours pas complètement compris, et leur identification est considérée comme le « Saint Graal » de la physique solaire.

« Il est évidemment trop tôt pour le dire, mais nous espérons qu’en reliant ces observations aux mesures de nos autres instruments qui ‘sentent’ le vent solaire qui passe à proximité de la sonde nous serons à terme capables d’apporter des réponses à certains de ces mystères, » déclare Yannis Zouganelis, scientifique adjoint sur le projet Solar Orbiter à l’ESA.

Observer la face cachée du Soleil

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Des vues complémentaires du Soleil et de son atmosphère extérieure, ou couronne, issues des instruments EUI, PHI, Metis et SoloHi.
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L’imageur polarimétrique et héliosismique (Polarimetric and Helioseismic Imager - PHI) est un autre instrument à la pointe de la technologie embarqué à bord de Solar Orbiter. Il fournit des mesures en haute résolution des lignes du champ magnétique à la surface du Soleil. Il est conçu pour surveiller les régions actives du Soleil, des zones où les champs magnétiques sont particulièrement forts et peuvent donnent naissance à des éruptions solaires.

Pendant une éruption solaire, le Soleil libère des rafales de particules énergétiques qui enrichissent le vent solaire, ce flux constant que notre étoile éjecte dans l’espace dans toutes les directions. Quand ces particules interagissent avec la magnétosphère terrestre, elles peuvent engendrer des orages magnétiques qui peuvent perturber les réseaux de télécommunications ainsi que les réseaux terrestres de distribution d’électricité.

Le Soleil et ses propriétés magnétiques observés par l'instrument PHI de Solar Orbiter.
Le Soleil et ses propriétés magnétiques observés par l'instrument PHI de Solar Orbiter.

« Nous sommes en ce moment dans une période très calme du cycle solaire, lui-même d’une durée de onze ans, » déclare Sami Solanki, directeur de l’Institut Max-Planck de recherche sur le Système solaire et investigateur principal de PHI. « Mais puisque Solar Orbiter observe le Soleil avec un angle différent de celui de la Terre, nous avons en fait pu observer une région qui n’était pas visible depuis la Terre. C’est une première. Nous n’avons jamais été capables de mesurer le champ magnétique à l’arrière du Soleil. »

Les magnétogrammes, qui montrent les variations de la force du champ magnétique solaire à la surface du Soleil, pourront ensuite être comparés avec les mesures effectuées par les instruments in situ.

« L’instrument PHI mesure le champ magnétique à la surface ; nous voyons des structures dans la couronne solaire avec EUI, mais nous essayons aussi de déduire les lignes du champ magnétique qui se prolongent dans le milieu interplanétaire, où se trouve Solar Orbiter, » déclare Jose Carlos del Toro Iniesta, co-investigateur principal de l’instrument PHI à l’Institut d’astrophysique d’Andalousie, Espagne.

Attraper le vent solaire

Combiner les observations par télédétection de SPICE avec les mesures in situ de SWA.
Combiner les observations par télédétection de SPICE avec les mesures in situ de SWA.

Les quatre instruments in situ de Solar Orbiter caractérisent ensuite les lignes du champ magnétique, ainsi que le vent solaire lorsqu’il passe à côté de la sonde.

Christopher Owen, du Laboratoire de science spatiale Mullard de l’University College de Londres, investigateur principal de l’analyseur de vent solaire in situ (Solar Wind Analyser - SWA), ajoute : « Nous pouvons estimer avec ces informations où a été généré le vent sur le Soleil, et utiliser ensuite la suite complète d’instruments de la mission pour révéler et comprendre les processus physiques à l’œuvre dans les différentes régions du Soleil qui sont à l’origine de la formation du vent solaire. »

« Nous sommes tous très excités suite à ces premières images — mais ce n’est que le début, » ajoute Daniel Müller. « Solar Orbiter a entamé un grand tour du Système Solaire, et il reviendra beaucoup plus près du Soleil dans moins de deux ans. A terme, il s’approchera au plus près à 42 millions de kilomètres, soit près d’un quart de la distance Terre – Soleil. »

« Les premières données démontrent déjà la puissance d’une collaboration réussie entre deux agences spatiales, et l’utilité d’un ensemble diversifié d’images pour éclaircir certains des mystères du Soleil, » commente Holly Gilbert, directrice de la division des sciences héliophysiques de la NASA et scientifique sur le projet Solar Orbiter à la NASA.

Un "portrait de famille" des premières images et données des dix instruments de Solar Orbiter.
Un "portrait de famille" des premières images et données des dix instruments de Solar Orbiter.

Solar Orbiter est une mission spatiale de collaboration internationale entre l’ESA et la NASA. Dix-neuf États membres de l’ESA (l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, la France, la Grèce, l’Irlande, l’Italie, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la République tchèque, le Royaume-Uni, la Suède et la Suisse) ainsi que la NASA ont contribué à la charge utile scientifique et/ou à la construction de la sonde. Le satellite a été construit au Royaume-Uni par le maître d’œuvre, Airbus Defence and Space.

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