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Proba-3's pair of satellites
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Face à face avec Proba-3, qui éclipsera le Soleil

12/01/2024 26 views 0 likes
ESA / Space in Member States / Switzerland - Français

C’est en exécutant un vol en formation, au millimètre près, que les deux satellites qui composent Proba-3 de l’ESA accompliront ce qui était auparavant mission impossible dans l’espace : projeter une ombre maintenue avec précision d’une plate-forme à l’autre. Celle-ci permettra de bloquer les rayons ardents du Soleil afin d’observer de manière prolongée sa fantomatique atmosphère environnante.

Les scientifiques de Proba-3 regardent le satellite occulteur
Les scientifiques de Proba-3 regardent le satellite occulteur

Avant le lancement simultané de la paire Proba-3  plus tard cette année, les scientifiques qui utiliseront les observations de Proba-3 ont pu voir les satellites de leurs propres yeux. Les membres de cette équipe testeront du matériel développé pour la mission lors d’une véritable éclipse solaire terrestre au-dessus de l’Amérique du Nord en avril prochain.

Les deux satellites sont actuellement en cours d’intégration finale dans les locaux de Redwire, près d’Anvers, en Belgique. Ils ont reçu la visite de l’équipe de travail scientifique de Proba-3, 45 physiciens solaires venus de toute l’Europe et du monde entier.

Satellites Proba-3
Satellites Proba-3

Bon nombre de ces experts assistent régulièrement à des éclipses solaires tout autour du globe, mais ils attendent avec impatience que Proba-3 ouvre une nouvelle perspective sur la mince couronne solaire. Cette région mystérieuse est importante car il s’agit de l’endroit où se créent les éjections de masse coronale - de vastes éruptions de particules chargées qui déclenchent les tempêtes solaires - et parce qu’elle a une influence sur la vitesse du vent solaire, qui est primordiale pour déterminer la météorologie spatiale.

« C’était quelque chose que de voir de près la partie matérielle du satellite », explique Joe Zender, scientifique du projet Proba-3 à l’ESA. « J’ai été particulièrement frappé par la proximité entre la tête de caméra sur le satellite coronographe et le panneau solaire, moins d’un mètre de distance. Alors que les panneaux solaires requièrent une forte luminosité, la caméra doit rester dans l’obscurité totale, sans aucune lumière parasite. Cela permet de bien réaliser à quel point la petite ombre projetée par l’occulteur devra être maintenue de façon précise. Nous avons également jeté un coup d’œil au bord soigneusement usiné du disque du satellite occulteur – habituellement maintenu sous un capot de protection avant le lancement. La courbe de ce bord a été spécialement conçue pour minimiser tout débordement de lumière solaire diffractée – celle-ci affecterait la qualité des images. »

Russell Howard avec Proba-3
Russell Howard avec Proba-3

L’astrophysicien américain Russell Howard, du laboratoire de physique appliquée de l’Université John Hopkins et qui a joué un rôle de premier plan dans la sonde solaire Parker de la NASA et la mission SOHO ESA-NASA, était également présent : « Les satellites sont plus petits que ceux avec lesquels j’ai travaillé – principalement parce qu’il s’agit d’un seul imageur solaire avec deux instruments beaucoup plus petits. Mais le concept de la mission est unique : personne n’a encore placé un occulteur à 150 mètres d’un télescope pour permettre d’observer extrêmement près du limbe du Soleil – comme si le satellite occulteur était une mini-Lune. Nous verrons le limbe solaire de moins près que lors d’une éclipse terrestre, mais avoir de telles images pendant des heures par rapport aux 5 à 10 minutes d’une d’éclipse sera spectaculaire. »

Les satellites Proba-3 créent une éclipse artificielle
Les satellites Proba-3 créent une éclipse artificielle

Poursuivant sa route vers l’Observatoire royal de Belgique à Bruxelles, l’équipe a ensuite discuté des préparatifs de la mission, notamment des projets de traitement et de diffusion des données, de la planification de co-observations avec d’autres missions dans l’espace et de l’évaluation des performances relatives de Proba-3 par rapport aux « coronographes » existants utilisés pour les observations coronales.

Ces télescopes intègrent des disques occultants internes pour obscurcir le disque solaire. Le problème, c’est que ces occulteurs internes souffrent de la diffraction;  la lumière qui se déverse autour de leurs bords masque les signaux intéressants, qui sont extrêmement faibles.

Le bord recouvert du disque occulteur
Le bord recouvert du disque occulteur

Damien Galano, responsable du projet Proba-3 chez ESA, remarque : « La meilleure façon de réduire la diffraction est d’augmenter la distance entre l’occulteur et le coronographe, ce qui est précisément ce que Proba-3 va faire. Pour la première fois, nous faisons voler notre coronographe et notre occulteur sur des plates-formes distinctes, espacées de 150 m et ce jusqu’à six heures par orbite, ce qui nécessite d’appliquer un éventail de technologies de positionnement pour les maintenir rigoureusement en place. »

Par définition, un test complet de bout en bout de Proba-3 est impossible ici sur Terre. Mais il a été expliqué lors de la réunion que le même ensemble de roues à filtres développées pour l’ASPIICS (en anglais : Association of Spacecraft for Polarimetric and Imaging Investigation of the Corona of the Sun) de Proba-3 sera utilisé pour observer l’éclipse solaire au-dessus de l’Amérique du Nord le 8 avril 2024, en même temps qu’une technologie de polariseurs à cristaux liquides.

Équipe de travail scientifique de Proba-3
Équipe de travail scientifique de Proba-3

« Les roues à filtres permettent l’observation de la couronne sous différents angles de polarisation, comme si l’on passait d’une paire de lunettes de soleil polarisées à une autre », ajoute Joe. « Le plaisir d’observer pendant une éclipse réelle c’est que nous n’avons pas besoin d’occulter pour avoir une idée exacte du type de résultats que nous allons récupérer avec Proba-3 ».

L’équipe scientifique a également discuté du deuxième instrument de Proba-3, le Digital Absolute Radiometer, DARA, qui mesurera l’irradiance solaire totale – soit exactement la quantité d’énergie que le Soleil dégage à tout moment.

« Si l’on suppose que le rayonnement du Soleil influence le climat de la Terre, il est important d’en mesurer les variations le plus précisément possible », note Joe.

Proba-3 doit être lancé en septembre prochain par le lanceur PSLV depuis l’Inde.

Fiche d’information de Proba-3
Fiche d’information de Proba-3

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