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Cycling on a centrifuge for space research
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60 jours alités pour la recherche spatiale

23/05/2023 1423 views 11 likes
ESA / Space in Member States / France

Rester au lit pendant 60 jours ... cela peut paraître un vrai bonheur, mais ajoutez à l’équation une épaule toujours en contact avec le matelas, de l’exercice sur vélo, des séances de centrifugation et des tests médicaux constants, et cela devient un véritable challenge dans l’intérêt de l’exploration spatiale humaine.

Un groupe de 12 volontaires vivent actuellement un voyage alité, incliné à -6°. Les participants sont maintenus dans des lits inclinés de 6° en dessous de l’horizontale, les pieds plus hauts que la tête, et ce tout au long de la journée, repas, douches et pauses toilettes inclus.

Les pieds plus haut que la tête pour l'étude d'alitement BRACE
Les pieds plus haut que la tête pour l'étude d'alitement BRACE

Dans cette position où le sang est dirigé vers la tête, où la masse musculaire s'amenuise en raison d’une sous-utilisation, les chercheurs étudient comment leur corps réagit. Les études d’alitement offrent un moyen de tester des mesures pour contrer certains des aspects négatifs de la vie dans l’espace.

Pendant les missions spatiales, le corps des astronautes subit un large éventail de changements dus à l’absence de gravité. Tout, de leurs yeux à leur cœur, est affecté ; les muscles et les os commencent même à se dégrader.

Vélo et centrifugeuse

L’étude BRACE (Bed Rest with Artificial gravity and Cycling Exercise ou Alitement avec gravité artificielle et exercice de cyclisme) étudie comment l’activité physique sur vélo, associée à de la centrifugation pourrait contrecarrer les changements que subit le corps humain dans l’espace.

Les vélos sont adaptés pour être utilisés en position allongée et sur un dispositif de centrifugation afin de simuler la gravité. Les volontaires sont mis en rotation pour diriger le sang vers leurs pieds, où la force de gravité double pendant la rotation. L’intensité de la force centrifuge est adaptée à chacun selon sa tolérance à l’hypergravité.

Une séance de vélo pour la science spatiale
Une séance de vélo pour la science spatiale

« Nous encourageons les volontaires à atteindre tous les jours un effort sous-maximal sur le vélo, puis comparons l’impact avec ceux qui ne font pas du tout d’exercice », explique Rebecca Billette, responsable médicale de la recherche clinique au MEDES, l’Institut de médecine et physiologie spatiales de Toulouse.

Les chercheurs compareront les données des volontaires ayant pratiqué du vélo alité avec ceux ayant pratiqué le vélo en rotation sur la centrifugeuse, ainsi qu’avec un groupe témoin dont les volontaires resteront alités pendant les deux mois complets sans faire ni de vélo ni de centrifugeuse. « Nous comparerons l’impact d’une routine d’exercice quotidienne sur une variété de facteurs physiologiques », ajoute Rebecca Billette.

C’est la première fois que le vélo fait partie d’une étude d’alitement en Europe.

Vélo et centrifugation pour la science spatiale
Vélo et centrifugation pour la science spatiale

« Nous espérons comprendre la valeur ajoutée de la gravité artificielle dans la routine de remise en forme suivie par les astronautes sur la Station spatiale internationale. L’équipage s’exerce deux heures par jour en orbite », explique Angelique Van Ombergen, responsable des sciences de la vie à l’ESA (Agence Spatiale Européenne) au sein de la division Exploration humaine et robotique.

La gravité artificielle est prometteuse car elle agit sur tous les organes humains à la fois. « Cela pourrait devenir une solution efficace pour garder un corps plus sain lors des missions spatiales de longue durée, si les défis technologiques peuvent être surmontés », ajoute Angelique Van Ombergen. 

L’espace pour la médecine sur Terre

Étude clinique d'alitement – impact sur le corps humain
Étude clinique d'alitement – impact sur le corps humain

Les astronautes sont confrontés à des problèmes physiologiques similaires à ceux des patients âgés et alités sur Terre. Les longs séjours en orbite affectent leurs muscles et leurs os.

« Des résultats d’analogues spatiaux peuvent être utiles pour concevoir de meilleurs traitements pour les personnes âgées et les patients souffrant de troubles musculo-squelettiques et d’ostéoporose sur Terre », explique Angelique Van Ombergen.

Depuis 2001, l’ESA organise régulièrement des études d’alitement de durée variable, tant avec des hommes qu’avec des femmes.

Infographie: l'étude d'alitement
Infographie: l'étude d'alitement

Cette étude est soutenue par l’agence spatiale française CNES (Centre National d’Etudes Spatiales). BRACE s’appuie sur une étude précédente centrée sur la gravité artificielle, menée par l’ESA avec les agences spatiales américaine et allemande en 2019 au centre aérospatial allemand, dans l'installation «:envihab » du DLR à Cologne, en Allemagne.

La prochaine étape pour un vol spatial simulé avec 12 autres volontaires aura lieu en Slovénie à l’Institut Jožef Stefan.

Les chercheurs mèneront une nouvelle série d’études de 60 jours combinant exercice de vibration et gravité artificielle.