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Le Soleil comme vous ne l’avez jamais vu

18/05/2022 2103 views 3 likes
ESA / Space in Member States / France

De puissantes éruptions, des vues à couper le souffle sur les pôles solaires, et un étrange « hérisson » solaire font partie des quelques clichés, films et données spectaculaires collectés par la sonde spatiale Solar Orbiter lorsqu’elle s’est étroitement approchée du Soleil. Bien que l’analyse du nouveau jeu de données vienne tout juste de commencer, il est déjà évident que la mission menée par l’ESA permet de fournir les plus extraordinaires prises de vue au cœur du comportement magnétique du Soleil et de la façon dont celui-ci détermine la météorologie spatiale.

L’approche la plus étroite du Soleil, ou le périhélie, effectué par Solar Orbiter, a eu lieu le 26 mars. La sonde spatiale se situait dans l’orbite de Mercure, à peu près à un tiers de la distance du Soleil à la Terre et son bouclier thermique a atteint 500 °C. Mais il a dissipé cette chaleur grâce à sa technologie innovante afin d’en assurer la protection et le fonctionnement.

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Zoom sur le Soleil au périhélie
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Solar Orbiter dispose de dix instruments scientifiques (dont neuf sont régis par les États Membres de l’ESA et un par la NASA), tous travaillant en étroite collaboration afin de permettre de fournir des images à couper le souffle du « fonctionnement » de notre étoile locale. Certains instruments sont des appareils de télédétection qui observent le Soleil, alors que d’autres enregistrent les données in situ autour du véhicule spatial, permettant ainsi aux scientifiques de « faire le lien » entre ce qu’ils voient se dérouler sur le Soleil et ce que Solar Orbiter « ressent » sur place en plein vent solaire, à des millions de kilomètres.

Lorsqu’il s’agit de périhélie, il est évident que plus le véhicule spatial s’approche du Soleil, plus l’instrument de télédétection peut distinguer de détails. Et par chance, Solar Orbiter s’est aussi trouvé plongé dans plusieurs éruptions solaires et même d’une éjection de masse coronale dirigée vers la Terre, fournissant un avant-goût de prévision météorologique spatiale en temps réel, une initiative de plus en plus fréquente en raison de la menace que la météorologie spatiale représente pour la technologie et les astronautes.

 

Passer aux faits marquants sélectionnés :

Présentation du hérisson solaire

Joining the dots – l’événement énergétique du 21 mars

Prévisions météorologiques spatiales – l’EMC du 10 mars

Prochainement

 

La galerie d'images ci-dessous présente le pôle sud du Soleil, les régions actives, le Soleil au périhélie et plus encore - cliquez sur les images et les films individuels pour plus d'informations :

Présentation du hérisson solaire

« Les images sont vraiment à couper le souffle », a déclaré David Berghmans, de l’Observatoire royal de Belgique et chercheur principal (CP) de l’Extreme Ultraviolet Imager (EUI), qui réalise des clichés de haute résolution des couches inférieures de l’atmosphère solaire, connue sous le nom de couronne solaire. Cette zone est le foyer principal de l’activité solaire déterminant la météorologie spatiale.

L’équipe de l’EUI doit maintenant déchiffrer les données. La tâche n’est pas facile car Solar Orbiter révèle une activité très intense à petite échelle sur le Soleil. Lorsque les scientifiques repèrent une particularité ou un événement qu’ils ne peuvent expliquer immédiatement, ils doivent fouiller dans les observations solaires précédentes lors d’autres missions spatiales pour vérifier si quelque chose de semblable a été observé auparavant.

« Même si Solar Obiter s’arrêtait demain de collecter des données, il me faudra encore des années pour les déchiffrer », a déclaré David Berghmans.

Une particularité assez spectaculaire a été observée lors de ce périhélie. Pour l’instant, elle a été surnommée « le hérisson ». Il s’étend sur 25 000 kilomètres autour du Soleil et il est constitué de nombreux pics de gaz chaud et froid qui partent dans tous les sens.

Joining the dots

Faire le lien lors d'un événement de particules énergétiques
Faire le lien lors d'un événement de particules énergétiques

L’objectif scientifique principal de Solar Orbiter est d’explorer l’interconnexion entre le Soleil et l’héliosphère. L’héliosphère est une immense « bulle » d’espace qui s’étend au-delà des planètes de notre système solaire. Elle est remplie de particules chargées en électricité qui ont la plupart été expulsées par le Soleil pour former le vent solaire. C’est le mouvement de ces particules et des champs magnétiques qui y sont associés qui créent la météorologie spatiale.

Afin de rendre compte des effets du Soleil sur l’héliosphère, les résultats provenant des instruments in situ, qui enregistrent les particules et les champs magnétiques qui balaient le véhicule spatial, doivent être reliés à des événements précédents sur ou près de la surface du Soleil, enregistrés par les instruments de télédétection.

Cela n’est pas une tâche facile car l’environnement magnétique autour du Soleil est extrêmement complexe, mais plus le véhicule spatial s’approche du Soleil, plus il est simple de relier au Soleil les événements à particules le long des « voies rapides » des lignes de champ magnétique. Le premier périhélie a été le test clé de cette tâche et les résultats semblent jusque-là très prometteurs.

Une éruption solaire s'élève de la surface du soleil
Une éruption solaire s'élève de la surface du soleil

Le 21 mars, quelques jours avant le périhélie, un nuage de particules énergétiques a balayé le véhicule spatial. Il a été détecté par le Détecteur de particules énergétiques (EPD). Et, fait le plus notoire, les plus énergétiques d’entre elles sont survenues en premier, suivies par celles de moins en moins chargées en énergie.

« Cela signifie que les particules n’ont pas été produites à côté du véhicule spatial », a expliqué Javier Rodríguez-Pacheco, de l’Université d’Alcalá de Henares en Espagne et chercheur principal à l’EPD. Elles ont plutôt été produites dans l’atmosphère solaire, plus près de la surface du Soleil. En traversant l’espace, les particules les plus rapides dépassent les plus lentes, tels des coureurs lors d’un sprint.

Le même jour, l’expérience des ondes radio et de plasma (RPW) a pu le prévoir, en captant le puissant balayage caractéristique des fréquences radio produit lorsque des particules accélérées - principalement des électrons - se déplacent en spirale le long des lignes du champ magnétique du Soleil. Les RPW ont ensuite détecté des oscillations appelées ondes de Langmuir. « Cela signifie que les électrons énergétiques ont atteint le véhicule spatial », a déclaré Milan Maksimovic, du LESIA, Observatoire de Paris et chercheur principal en RPW.

Parmi les instruments de télédétection, l’Extreme Ultraviolet Imager (EUI) et le Spectomètre/Télescope à rayons X (STIX) ont tous deux observé des événements sur le Soleil qui auraient pu être à l’origine de la libération des particules. Alors que L’EPD et les RPW ont détecté les particules qui se déversent dans l’espace, il est important de noter que d’autres particules peuvent se diriger vers le bas de l’événement, frappant les niveaux inférieurs de l’atmosphère du Soleil. C’est là que le STIX entre en jeu.

Alors que l’EUI perçoit la lumière ultraviolette dégagée par la zone de l’éruption dans l’atmosphère du Soleil, le STIX observe les rayons X produits par les électrons accélérés par l’interaction entre l’éruption et le noyau atomique dans les couches inférieures de l’atmosphère du Soleil.

L’objectif des équipes de chercheurs est désormais de déterminer comment ces observations sont liées.  Des indices montrent qu’en partant de la composition des particules détectées par l’EPD, celles-ci sont susceptibles d’avoir été accélérées par un choc coronal lors d’un événement survenu plutôt graduellement que de façon impulsive lors d’une éruption.

« Il pourrait exister de nombreuses zones d’accélération », a démontré Samuel Krucker, de la University of Applied Sciences and Arts of Southern Switzerland en Suisse et chercheur principal au STIX.

Eruption solaire du 2 mars 2022
Eruption solaire du 2 mars 2022

Pour ajouter un bémol à cette situation, le Magnétomètre (MAG) n’a rien enregistré d’important au même moment. Cependant, cela n’est pas inhabituel. L’éruption initiale de particules, appelée Éjection de Masse Coronale (EMC), dispose d’un champ magnétique fort que le MAG peut facilement détecter, mais les particules énergétiques de l’événement se déplacent plus rapidement que l’EMC et peuvent promptement remplir de grands volumes d’espace et donc être détectées par Solar Orbiter. « Mais si l’EMC n’atteint pas la sonde, alors le MAG ne verra rien », a affirmé Tim Horbury, de l’Imperial College au Royaume-Uni et chercheur principal du MAG.

Lorsqu’il s’agit de champ magnétique, tout commence à la surface visible du Soleil, connue sous le nom de photosphère. C’est là que le champ magnétique généré à l’intérieur du Soleil s’éjecte dans l’espace. Pour savoir à quoi cela ressemble, Solar Orbiter dispose d’un Imageur polarimètre et héliosismique (PHI). Celui-ci peut voir la polarité magnétique du nord et du sud sur la photosphère ainsi que l’ondulation de la surface du Soleil, due aux ondes sismiques se déplaçant à l’intérieur.

« Nous fournissons les mesures du champ magnétique à la surface du Soleil. Ce champ s’étend ensuite, entre dans la couronne et est à l’origine de toutes les étincelles et de l’action que vous voyez là-haut », déclare Sami Solanki, de l’Institut Max-Planck de recherche sur le système solaire de Göttingenen en Allemagne et chercheur principal du PHI.

Un autre instrument, l’Imageur Spectral de l’Environnement Coronal (SPICE), enregistre la composition de la couronne. Ces « cartes de la profusion » peuvent être comparées aux composants du vent solaire visionnés par l’analyseur du vent solaire (SWA).

« Cela va traquer l’évolution de la composition du vent solaire du Soleil à la sonde, et ce qui va nous révéler les mécanismes à la base de l’accélération du vent solaire », a annoncé le chercheur principal du SPICE, Frédéric Auchère, de l’Institut d’Astrophysique Spatiale en France.

Prévoir la météorologie spatiale

Prévoir la météorologie spatiale
Prévoir la météorologie spatiale

En combinant les données de tous ces instruments, l’équipe scientifique sera capable de connaître l’histoire de l’activité solaire depuis la surface du Soleil, jusqu’à Solar Orbiter et au-delà. Et ces connaissances mèneront précisément à un nouveau système conçu pour prévoir les conditions météorologiques spatiales sur Terre en temps réel. Durant la période précédant le périhélie, Solar Orbiter a même pu avoir un avant-goût de la manière dont ce système pourrait fonctionner.

 Le véhicule spatial se déplaçait en amont de la Terre. Cette perspective unique signifie qu’il observait les conditions du vent solaire qui allait atteindre la Terre quelques heures plus tard. Étant donné que le véhicule spatial était en contact direct avec la Terre, avec ses signaux voyageant à la vitesse de la lumière, les données sont arrivées au sol en quelques minutes, prêtes à être analysées. Par chance, plusieurs éjections de masse coronale (EMC) ont été détectées vers cette heure-là, certaines se dirigeant directement vers la Terre.

Le 10 mars, une EMC a balayé le véhicule spatial. En utilisant les données du MAG, l’équipe a pu prédire quand elle serait susceptible de toucher la Terre. Grâce aux annonces sur les réseaux sociaux, les observateurs du ciel ont pu se préparer à observer l’aurore, véritablement survenue à peu près 18 heures après l’horaire estimé.

Cette expérience a permis à Solar Orbiter d’avoir un avant-goût des prévisions des conditions météorologiques spatiales de la Terre en temps réel. Une telle initiative devient de plus en plus nécessaire en raison de la menace que la météorologie spatiale représente pour la technologie et les astronautes.

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Energie solaire spectaculaire
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L’ESA est actuellement en train de planifier une mission appelée ESA Vigil qui évoluera du côté du Soleil regardant vers la région de l’espace menant à la Terre. Son rôle consistera à prendre des clichés des EMC se déplaçant dans cette région, notamment celles se dirigeant vers notre planète. Pendant le périhélie lui-même, Solar Orbiter était positionné de telle façon que ses instruments METIS et SoloHI pouvaient fournir exactement ce types d’images et de données.

METIS prend des photos de la couronne depuis 1,7-3 rayons solaires. En cachant le disque lumineux du Soleil, il peut voir la couronne, celle-ci étant moins brillante. « Il donne les mêmes détails que pendant une éclipse totale, mais, plutôt que de durer quelques minutes, METIS peut l’observer continuellement », a affirmé Marco Romoli de l’Université de Florence en Italie et chercheur principal de l’instrument METIS. 

SoloHI enregistre les images éparpillées par les électrons dans le vent solaire. Une éruption en particulier, le 31 mars, a été classée X , le type le plus énergétique connu jusque-là. Les données n’ont pas encore été analysées car il en reste encore beaucoup dans le véhicule spatial en attente de téléchargement. Maintenant que Solar Orbiter s’est davantage éloigné de la Terre, le taux de transfert de données a ralenti et les chercheurs doivent donc être patients, mais ils sont plus que prêts à commencer leur analyse quand celles-ci leur parviendront.

« Les grands événements nous intéressent toujours car ils fournissent les plus grandes réponses et la physique la plus intéressante et nous permettent d’accéder à l’extrême », déclare Robin Colaninno, U.S. Naval Research Laboratory à Washington DC, et chercheur principal au SoloHI.

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Vers le soleil et de retour
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Prochainement

Il ne fait aucun doute que les équipes travaillant sur les instruments ont du pain sur la planche. Le périhélie a été un franc succès et a généré une haute qualité de données extraordinaires. Et ceci n’est qu’un avant-goût de ce qui nous attend. Le véhicule spatial fonce déjà dans l’espace pour se préparer à son prochain périhélie, légèrement plus proche, le 13 octobre, à 0,29 fois la distance Terre-Soleil. Avant cela, le 4 septembre, il effectuera son troisième survol de Vénus.

Solar Orbiter a déjà effectué ses premiers clichés des régions polaires du Soleil encore inexplorées, mais il reste encore tellement à voir... 

Le 18 février 2025, Solar Orbiter rencontrera Vénus pour la quatrième fois. Cette rencontre fera s’incliner l’orbite du véhicule spatial d’environ 17 degrés. Le cinquième survol de Vénus le 24 décembre 2026 l’augmentera encore de 24 degrés et marquera le début de la mission de « haute latitude ».

Lors de cette étape, Solar Orbiter observera les régions polaires du Solaire plus proche que jamais. De telles observations en perspective sont la clé pour comprendre l’environnement magnétique complexe des pôles qui pourrait à son tour détenir le secret du cycle de 11 ans d’activité croissante et décroissante du Soleil.

« Nous sommes très heureux de la qualité des données de notre première périhélie », déclare Daniel Müller, scientifique du projet Solar Orbiter à l’ESA, « Il est difficile de croire qu’il s’agit juste du début de la mission. Nous allons en effet être très occupés. »

 

Notes aux rédacteurs

Solar Orbiter est une mission spatiale de collaboration internationale entre l’ESA et la NASA. 

Les périhélies précédents ont eu lieu le 15 juin 2020 (0,52 AU), le 10 février 2021 (0,49 AU) et le 12 septembre 2021 (0,59 AU). Le périhélie du 26 mars 2022, à 0,32 AU, est considéré comme le premier d’une série de périhélies proches. Le prochain, le 13 octobre 2022 aura lieu à 0,29 AU. 2 à 3 périhélies ont lieu chaque année. Cliquez ici pour obtenir la liste complète des périhélies et des survols assistés par gravité de Vénus.

De plus amples informations concernant ces étapes importantes seront fournies en temps voulu.

Pour toute information complémentaire, veuillez contacter les relations avec les médias de l’ESA via media@esa.int.

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